MADRES PARALELAS

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Dans « Madres Parallelas » (Mères parallèles), Pedro Almodovar revient une nouvelle fois sur la complexité psychologique des femmes devenues mères à leur corps défendant. Point ou peu de pères à l’horizon et toujours chez ces femmes blessées, une rage sororale de vivre.

Dans ce film de 2021, Penélope Cruz et une jeune femme (Milena Smit) accouchent en même temps de deux filles et leurs destins vont s’en trouver mêlés pour le meilleur et pour le pire. L’amitié, la bisexualité, le sentiment maternel, l’appartenance, le sens de la parentèle et le vertige généalogique, sont au cœur d’un film conçu comme un mélo et qui accouche d’une œuvre quasi anthropologique sur la transmission.

On y retrouve Rossy de Palma, la pétulante amie de Pedro et son physique aquilin, une autre habituée du cinéaste espagnol, la chevronnée Julieta Serrano Romero, enfin Aitana Sánchez-Gijón. Quant à Pené
lope elle ne fera jamais tapisserie surtout, chez Almodovar.

 
Dans le même genre vous pouvez trouver MOMMY DE XAVIER DOLAN (2014) (Quand l'enfant est paru depuis longtemps et qu'il se déchire avec sa mère célibataire. Un film coup de poing du cinéaste québécois sur l'impossibilité d'assumer sa progéniture et de trouver sa place dans le monde.) ou encore LA VIE EST UN LONG FLEUVE TRANQUILLE D'ETIENNE CHATILIEZ (1988) (Sur le thème de l'échange d'enfants à la maternité, une comédie sociale où le déterminisme pour rire ne s'exprime pas exactement comme on l'attendait. Le film phénomène de Chatiliez avec un enfant acteur qui, adulte, deviendra une star : Benoit Magimel.).

Résumons nous : on trouve dans « Madres Paralelas » une fille-mère, des grossesses surprises, des mères célibataires, des hommes virtuels, des aïeuls enterrés, des mères absentes, un viol collectif, une liaison lesbienne, des bébés échangés, une mort subite du nourrisson, et, pour nous résumer des familles tellement recomposées, qu’on ne sait plus où donner du test ADN. Il ne manquait que la GPA pour la contemporanéité du sujet soit totale.

Le grand Pedro poursuit son roman-photo sur les mœurs sexuelles et genrées (ou non) de son pays, avec une réjouissante santé. Ses géométries féminines, ses gynécées paradoxales nourrissent un scénario aussi implacable qu’il est invraisemblable. Le cinéaste est par ailleurs le roi de l’ellipse sautant les étapes ou les années avec la célérité d’un vieux briscard. Le théâtre est présent en arrière-plan avec des références à des pièces de Lorca ("Dona Rosita la célibataire") ou O’Neil (« Le long voyage vers la nuit »).

Le projet remonte à 1999, quand le cinéaste s’en était ouvert pour la première fois à son actrice. C’est d’ailleurs devenu la 7e collaboration de Penélope Cruz avec le cinéaste espagnol. On y aborde un grave traumatisme collectif : les charniers de l’ère franquiste qui n’ont pas tous révélé leurs victimes et permis aux familles d’inhumer leurs ancêtres. Bref on sait où l’on est né mais pas toujours on l’on finira.

Il y a bien des moments pour se laisser porter, car Madres paralelas ne brille pourtant pas par une créativité débridée. On peut regretter d'office, les envolées parfaitement excessives de ses actrices et Almodovar à l'instar d'une Rossy de Palma ici, au repos, semble loin ...

Avant tout, il y a ce bonheur renouvelé des couleurs chaudes d'Almodovar et de sa science du montage, qui nous fait passer avec fluidité d'une temporalité à une autre, avec ellipses, ou pas. Madres paralelas, comme son nom l'indique, est une histoire de maternité, tardive ...

Sujet délicat, premiers retours critiques partagés et quelques réserves personnelles sur les derniers faits et gestes de Pedro Almodovar, il ne m'en fallait pas moins pour craindre le résultat de Madres paralelas. Sans grande conviction, c'est la facette du cinéaste que j'apprécie ...