Lumière 2014 — Thierry Frémaux : Lumière sur le passé
VIDEO | 2014, 10' | Après une semaine intense, le festival s'est clos à Lyon après avoir reçu Michael Cimino, Pedr1
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Maxime et Stéphane sont amis, luthiers et associés. Quand Maxime annonce son amour pour Camille, Stéphane ironise, mais se rapproche pourtant de la jeune femme.
Maxime et Stéphane sont luthiers, associés et amis. Le jour où Maxime annonce à Stéphane qu'il a trouvé l'amour, ce dernier se moque et s'enferme dans une froideur méprisante. La maîtresse de Maxime est une belle et talentueuse violoniste. Par défi, mais sans perdre la distance qui le caractérise, Stéphane se rapproche de la jeune femme... Lion d'Argent Venise 1992, César du meilleur réalisateur
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" C’est un film sur l’âme. Celle du violon et celle des hommes. Un beau film harmonieux et lisse comme un joyau poli
" C’est un film sur l’âme. Celle du violon et celle des hommes. Un beau film harmonieux et lisse comme un joyau poli. Un de ces moments de grâce où tout concourt à la perfection, rencontre magique entre un scénario sans hiatus, trois comédiens inspirés et une mise en scène à la beauté classique.
Ce film sans dissonance nous happe dès la première image — le gros plan d’un violon dans l’atelier d’un luthier — et ne nous lâche plus jusqu’à la dernière : celle d’un homme que l'on voit à travers la vitre d’un café, assis à une table, enfermé dans sa solitude comme dans un bocal. Enfin, presque enfermé. Car, précisément, l’histoire que nous conte Claude Sautet dans son plus beau film est celle d’une brèche dans la carapace ou est emmuré le cœur de Stéphane.
Stéphane le luthier. Stéphane dont on a vu les doigts saisir délicatement, amoureusement, le violon de la première image. Et son regard grave, alors, était bien celui d’un amoureux. Mais Stéphane ne peut aimer que la musique. Parce que, dit-il, « la musique, c'est du rêve ». Stéphane traverse la vie, froid, insensible. Il nie les sentiments. Il dit ; « Je n'y ai pas accès. » Il se croit infirme. Comme « la Sorellina », dans Les Thibault il pourrait dire : « Et moi, ce cœur clos, induré. » Mais qui est vraiment Stéphane ? Et qu’est-ce qui le pousse soudain à vouloir séduire Camille, l’amie de Maxime, son associé ? Stéphane, Camille, Maxime : trois prénoms asexués pour une analyse psychologique en forme d’épure. Fascinés, nous cherchons à lire dans les yeux du trio ce que ne disent pas les mots, à vérifier dans les regards la véracité des propos.
(…) Si Stéphane est la figure centrale du trio, séducteur pris à son propre piège, Camille et Maxime, eux aussi, évoluent. En révélant Stéphane à lui-même, Camille se blesse cruellement : « C'est moi qui suis vide, maintenant », lui dit-elle. Et le léger, l’élégant Maxime s’avère lucide et généreux : son élégance est aussi celle de l’âme. L’âme, toujours. Sautet, luthier génial, la rend visible à nos yeux, comme Maxime et Stéphane extirpent pour le polir ce petit morceau de bois qu’on appelle l’âme du violon. C’est parce qu'Un cœur en hiver est aussi un reportage très concret sur la lutherie qu’il peut aller aussi loin dans le mystère des êtres.
Le célèbre luthier Etienne Vatelot a revu les dialogues, conçu le décor des ateliers, appris aux comédiens les gestes de son métier et les rapports très étroits qui existent entre luthier et musiciens. « Quand un violoniste entre dans un atelier, dit Vatelot ce n'est pas un client mais un ami inquiet qui vient nous consulter : "Qu est-ce qui se passe, j’ai mon violon qui ne se trouve pas bien, j’aimerais bien que tu l'auscultes.” »
Si Daniel Auteuil est génial dans le rôle de Stéphane l’introverti, si André Dussollier est meilleur qu’il n’a jamais été depuis longtemps — lumineux, habité dans le rôle de Maxime —, ce n’est pas dû seulement à la superbe direction d’acteur de Claude Sautet. Etienne Vatelot leur a permis de s’appuyer sur du concret. Et la justesse d’un geste, l’authenticité d’une réplique, a dû donner à leur jeu une solide armature.
Quant à Emmanuelle Béart - sublime —, elle a travaillé un an et demi le violon pour rendre crédible son jeu : tenue de l’archet, position des doigts. Et cette discipline n’a pas servi uniquement sur le plan technique. Elle lui a aussi permis de mieux être Camille : une artiste qui a toujours fait passer son art avant l’amour et qui est un peu plus désarmée qu’une autre en face de Stéphane. La musique n’est donc pas ici qu’un élément pittoresque. C’est à travers elle, par un subtil jeu de correspondances, que Claude Sautet nous fait saisir l’insaisissable. C’est au cours des répétitions d’un enregistrement de deux sonates et d’un trio de Ravel que les rapports ambigus de l’autre trio — Maxime, Camille, Stéphane — se dévoilent.
(…) Un Cœur en hiver est l’histoire d’un désastre. Mais d’un désastre qui laisse percer l’espoir. D’un désastre bienheureux, puisqu’il redonne à Stéphane un cœur de chair. Dans son nouvel atelier, les murs ne sont plus bleus — couleur froide — mais d’un blanc légèrement ocré — la couleur chaude de la terre."
" Inspiré d’une nouvelle de Lermontov, le personnage de Stéphane, cet automate handicapé du cœur qui
" Inspiré d’une nouvelle de Lermontov, le personnage de Stéphane, cet automate handicapé du cœur qui ne croit qu’au rêve, se blinde d’indifférence pour se protéger d’une douleur, est un antihéros : ses motivations, ses réactions sont désarmantes, presque incompréhensibles. Et, cependant, le spectateur s’identifie à lui, chacun cherche en son propre mystère la trace de semblable fêlure, l’abri d’une possible flamme. Grâce évidemment à la performance de Daniel Auteuil (comme à celle de tous les comédiens : illuminés, parfaits). Grâce au savoir-faire artisanal d’un Claude Sautet expert à faire vibrer la corde sensible de l’émotion sur une partition de silences, demi-mots, non-dits, désirs refoulés.
Cette histoire grave, mélancolique, à fleur d’âme, à la Henry James, de deux êtres amoureux qui se ratent est d’autant plus déchirante que l’on y décèle une discrète confession d’auteur. Après avoir dépeint les fugues affectives de quinquagénaires guettés par la solitude, Sautet semble oser une autocritique intime : ce jeune homme qui observe, reste en retrait, comme hors jeu, vigilant à voir et entendre sans être vu, est sans doute le cinéaste au crépuscule de son bilan, à l’heure des regrets, taraudé par la crainte des connivences perdues. Ce que l’on décèle dans ce face-à-face entre la belle de feu (« J’ai envie de vous. ») et le desséché glacial (« Je ne vous aime pas. ») est d’autant plus poignant qu’il est habité par un malentendu, distillé à contrecœur, esquissé sur un visage, à happer comme une émotion, au vol."
" ... Revu en tant qu’avant-demier film de Sautet, il se révèle plus comme un aveu voilé, la confession dis
" ... Revu en tant qu’avant-demier film de Sautet, il se révèle plus comme un aveu voilé, la confession dissimulée d’un être qui, à l’âge de 78 ans, jouant de trois instruments humains, osait enfin inviter ses spectateurs à écouter sa musique de chambre personnelle (...)
Claude Sautet était un être qui se cachait. Sur la défensive au premier abord, puis maladroit en paroles, s’ouvrant peu à peu quand la confiance s’établissait, il laissait alors percevoir à son interlocuteur quelques fragments de sa vérité intérieure. Son art était à l’image de sa nature, un art des sentiments feutrés, ceux qui ne peuvent être exprimés - pudeur oblige - qu’au moyen de phrases lapidaires, de silences révélateurs, de regards alternant expressions esquissées et retenues profondes. Un cœur en hiver fut alors son miroir le plus intime. Et le restera.
Conçu avec l’aide de Jérôme Tonnerre tout d’abord, puis de Jacques Fieschi, Un cœur en hiver est un film éminemment personnel car fortement imprégné de musique, l’autre grande passion de Claude Sautet. Non pas que le film déborde de scènes où les trios et sonates de Maurice Ravel abondent - celles-ci n’occupent en réalité que huit minutes et demie du métrage -, mais plutôt parce qu’il parvient, à travers les moyens propres au cinématographe, à reproduire cette gigantesque force émotionnelle que véhicule la musique et que souvent le septième art ne peut égaler.
La musique nous offre ici toute sa puissance lorsque, jouée avec passion par Emmanuelle Béart, elle est regardée froidement mais aussitôt profondément intériorisée par Daniel Auteuil. En l’absence des instruments pratiqués, une autre sorte de musique, tout aussi pénétrante, se fait entendre dans les voix des comédiens, comme celle, brisée, de Béart qui se heurte aux courtes phrases autoprotectrices d’Auteuil dans la scène où ce dernier lui avoue que, pour lui, « la musique, c’est du rêve ». Mais la musique naît aussi des silences embarrassés qui ponctuent l’aveu de Béart à André Dussollier, à propos de l’attirance qu’elle éprouve pour Auteuil.
Une autre musique, encore, provient de la perfection du rythme discret des champs-contrechamps, ainsi que de la succession judicieusement mesurée des séquences. Tout, dans Un cœur en hiver, est donc musique. Musique d’un cœur fermé qu’un jeu jaloux et cynique force à s’ouvrir pour être finalement muré à jamais. Musique d’un cinéma qui, soudain, sonde l’indicible vulnérabilité d’un cinéaste qui jusqu’ici se dissimulait derrière la masse protectrice d’un groupe ordinaire, et qui maintenant s’expose dans l’ombre de trois êtres d’exception. Musique de ces simples choses de la vie qui défient le temps et nous pénètrent inlassablement. Un cœur en hiver ou la confession d’un cinéaste à la solitude enfin contrariée."
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