LE CHAT DU RABBIN

en VOD

Un film d'animation signé Joann Sfar… Sur le papier, cela semble évident et pourtant, il aura fallu que le dessinateur passe par la case fiction avec Gainsbourg, vie héroique pour que le projet aboutisse enfin… Avec Le chat du rabin, Sfar adapte la BD qui l'a rendu célèbre : 5 volumes au total, publiés dans le monde entier entre 2002 et 2006… L'histoire ? Elle est simple et profonde à la fois, faisant la part belle aux contes orientaux et aux valeurs humanistes.

Un matou, dont le maître est la rabin d'Alger, croque un jour un perroquet. Le voilà doué de parole mais il n'est capable que de dire des vérités ou des mensonges sans en mesurer les conséquences. Son maître décide alors de lui inculquer les principes des grands textes religieux pour en faire un bon juif et l'éloigner de sa fille, la belle Zlabya, sur qui notre chat à une néfaste influence.

Joann Sfar, vous allez le voir, fait de ce récit initiatique une farce cruelle et tendre qui donne au passages quelques coups de griffes et de dents aux idées reçues mais n'est jamais moralisatrice… Le casting voix est à la hauteur d'une animation totalement différente de ce que l'on peut voir chez Pixar ou Dreamworks : François Morel, Hafzia Herzi, Eric Elmosnino ou Mathieu Amalric vous entrainent maintenant au début du 20e siècle, de l'autre côté de la Méditerranée…

 
Dans le même genre vous pouvez trouver PERSÉPOLIS (Marjane Satrapi comme Joan Sfar a d'abord fait ses armes dans le monde à part de la bande dessinée, avant de s'aventurer dans la jungle du cinéma !) ou encore LE ROI LION (Les films d'animation ont longtemps brassé des thématiques mièvres, destinées au très jeune public. "Le roi lion" tout comme "Le chat du rabin" prouvent que petits et grands peuvent y trouver leur compte.).

La tolérance, l'amour de son prochain, la quête de la spiritualité, la liberté et l'amitié : les grandes et belles qualités humaines ne manquent pas, vous l'avez vu, dans ce Chat du rabbin. Mais Joann Sfar reste un observateur critique de notre temps. Il n'a pas pu s'empêcher d'écorner un de ses maîtres, Hergé, en parodiant à l'extrême le mythique Tintin.

François Damiens et son accent belge font du célèbre reporter blondinet une caricature du colonialiste obtus et imbécile ! Damiens comme les autres comédiens qui ont prêté leurs voix à ce film ont enregistré leurs prestations dans des conditions inédites : Joann Sfar, (pour mieux les imprégner de son univers), les a en effet costumés à l'image des personnages qu'ils devaient incarner. Le résultat est surprenant et inhabituel dans ce registre parfois asseptisé de l'animation.

Le film aura mis près de 5 ans à se monter et doit l'accélération de son processus de fabrication à une autre dessinatrice passée avec succès de la case BD au grand écran : Marjane Satrapi. C'est en effet la reconnaissance mondiale de Persepolis en 2007 qui a permis à Joan Sfar de mettre définitivement son projet sur de bons rails. D'ailleurs, c'est à Cannes, cette année-là, qu'il a peaufiné ses plans et séduit les investisseurs indispensable à sa réalisation.

L'ironie veut que Satrapi soit elle ensuite venue à la fiction en adaptant avec des comédiens en chair et en os ses albums "Poulet aux prunes"… Tous deux sont désormais les fers de lance d'un cinéma animé tricolore aux inspirations multicolores, célébré dans le monde entier et regardé avec intérêt par Hollywood. Revenons enfin sur la qualité d'un autre éléments essentiel de ce Chat du rabbin : la musique du film… Si Olivier Daviaud, compagnon de route de Jacques Higelin, Bénabar ou Thomas Fersen, est à la baguette pour les thèmes principaux, c'est Enrico Macias qui signe la chanson de fin, supplique amoureuse du matou pour que sa maîtresse ne se marie jamais et lui reste éternellement fidèle…